Message
di Maurice Bejart
(Lausanne, le 3 juillet
2000)
Chères amies, chers
amis,
Ne pouvant malheureusement pas être à vos côtés pour un
événement de cette importance dans ma ville natale, je viens associer ma pensée
à vos personnalités rassemblées dans ce Marseille que j’aime tant.
Au cours des siècles derniers, Marseille, grand centre
commercial international, port ouvert sur la Méditerranée et l’Orient, a laisse
l’image d’une ville active, turbulente, portée par cette fièvre qui agita la
France colonisatrice, où l’action semble toujours primer sur la méditation.
Pourtant la vie
culturelle de Marseille, bien que plus cachée, n’en n’est pas moins d’une
richesse extrême.
Je citerai à ce propos l’exemple d’un être qui m’a tant
donné, mon père. Comme les premièrs navigateurs grecs qui découvrient cette
calanque harmonieuse que nous nommons le « vieux port », Gaston
Berger, né au Sénégal, aborda Marseille très jeune au sortir de la Grande
Guerre, où il s’était engagé volontaire à 18 ans, et s’y fixa, épousant une
Marseillaise authentique. Il entra dans une entreprise d’engrais organiques
dont il devint rapidement l’un des directeurs. Mais, très vite, la fièvre
intellectuelle qui l’avait poussé vers la recherche philosophique l’obligera,
avec l’aide d’amis marseillais, a fonder la Société d’études philosophique.
Aussi, dans cette rue Ferrari, qui descende la plaine
vers St-Pierre, au 120, l’usine artisanale déployait ses bâtiment mais, cachée
dans un immense grenier, la bibliothèque philosophique authentiquement
marseillais était un centre français et mondial de pensée et de culture.
Si j’ai pris l’exemple de mon père ce n’est pas par
orgueil familial mais parce qu’à Marseille la culture présente, vivante mais
souvent occultée par la vitalité extérieure de la ville, est d’une grande
richesse et d’une intense générosité. Merci à la Ville de Marseille, à sa
Municipalité et à ses habitants d’être souvent l’avant-garde de la pensée en
France.